
Nouvelle réforme des congés payés :
Par la Loi DDADUE (Diverses Dispositions d’Adaptation au Droit de l’Union européenne) du 24 avril dernier, la France s’est mise en conformité avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui prévoit en son article 31 §2 que…
Tout travailleur a droit à (…) une période annuelle de congés payés.
Les congés annuels pendant un arrêt maladie
Jusqu’à présent, le Code du travail français empêchait l’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie non professionnelle, quelle qu’en soit la durée. Même pour les arrêts liés à un accident du travail ou une maladie professionnelle, cette acquisition s’arrêtait après un an.
La réforme s’appuie sur l’article 7 de la directive européenne 2003/88, qui stipule que :
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines (…).
Récapitulatif des changements apportés sur la nouvelle réforme des congés payés
Acquisition de Congés Payés en cas d’arrêt maladie d’origine non professionnelle
AVANT :
0 (hors accord d’entreprise ou usage plus favorable)
APRÈS :
2 jours ouvrables
ou 1,67 jours ouvrés
jusqu’à un maximum de :
24 jours ouvrables par an
ou 20 jours ouvrés par an
Acquisition de Congés Payés en cas d’arrêt maladie d’origine professionnelle (AT/MP)
AVANT :
2,5 jours ouvrables
ou 2,08 jours ouvrés
Acquisition limitée à 1 an d’arrêt de travail ininterrompue
APRÈS :
2,5 jours ouvrables
ou 2,08 jours ouvrés
Acquisition sans limite de durée
Prise de congés payés
AVANT :
12 mois à l’issue de la période d’acquisition
Après : perte des jours de congés non pris
APRÈS :
Les congés payés acquis, mais non pris en raison d’un arrêt maladie, peuvent être reportés sur une période de 15 mois.
*Arrêt de moins d’un an (principe)
Report de 15 mois qui débute à compter de l’information des salariés sur ses droits à CP.
Arrêt d’au moins un an (dérogation)
Report de 15 mois qui débute à compter de la fin de la période d’acquisition des CP
Délai de report : quelques exemples pour y voir plus clair !
Cas général du report des congés payés non pris en raison d’un arrêt de travail
Prenons l’exemple d’un salarié absent pour maladie du 1er janvier 2025 au 2 avril 2025. Voici les périodes de prise de congés de son entreprise :
- 1er juin 2024 – 31 mai 2025 : pour les congés acquis entre le 1er juin 2023 et le 31 mai 2024.
- 1er mai 2025 – 30 avril 2026 : pour les congés acquis entre le 1er juin 2024 et le 31 mai 2025.
Le salarié reprend son travail le 2 avril 2025 et l’employeur l’informe de ses droits le 15 avril 2025.
Le salarié reprend le travail le 2 avril 2025 et est informé de ses droits le 15 avril 2025.
Dans ce cas :
- Congés acquis avant la maladie : Ces congés peuvent être reportés jusqu’au 15 juillet 2026 (15 avril 2024 + 15 mois).
- Congés acquis pendant la maladie : Ils ne peuvent être reportés, car le salarié reprend le travail avant le début de la période de prise.
Source: Code du travail numérique
Cas particuliers : situations spécifiques
Salarié absent jusqu’à l’expiration de la période de report
Un salarié en arrêt prolongé perd ses congés acquis s’il ne reprend pas le travail avant la fin de la période de report.
Salarié reprenant le travail pendant la période de report
La période de report est suspendue jusqu’à ce que l’employeur informe le salarié de ses droits.
Par exemple :
- Arrêt maladie du 26 avril 2024 au 31 juillet 2025.
- Période de report : 1er juin 2025 au 1er septembre 2026.
- Si le salarié reprend le 1er août 2026 et est informé le 7 août, le report est prolongé jusqu’au 7 septembre 2026.
Salarié retombant malade pendant la période de report
Dans ce cas, la Direction Générale du Travail recommande une adaptation au cas par cas, inspirée de la jurisprudence européenne. Cette solution manque cependant de clarté et peut entraîner des incompréhensions.
Que retenir ?
Il est crucial pour les employeurs et les partenaires sociaux de définir des règles claires et uniformes pour éviter un sentiment d’injustice au sein des entreprises.
Application rétroactive de la réforme
Période rétroactive : décembre 2009
La réforme est rétroactive au 1er décembre 2009, date d’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne. Elle permet aux salariés concernés de revendiquer des congés pour les arrêts maladie remontant à cette période.
Date limite pour revendiquer les congés payés pour arrêt maladie :
Salariés encore présents | Dans les 2 ans soit avant le 24 avril 2026 |
Salariés sortis | Dans les 3 ans soit avant le 24 avril 2027 |
sont donc concernés les arrêts de travail ayant eu lieu depuis cette date.
Cependant, cette rétroactivité ne s’applique pas à :
- La suppression de la limite d’un an pour les arrêts liés à un accident ou une maladie professionnelle.
- Les actions en justice des salariés ayant quitté leur employeur depuis plus de trois ans.
Information et affichage bulletin
L’employeur doit informer chaque salarié du nombre de jours de congé disponibles et de leur date limite de prise dans le mois suivant la reprise du travail. Ces informations doivent figurer sur le bulletin de paie, avec une distinction claire entre :
- Les congés acquis sur la base des jours travaillés.
- Les congés acquis pendant un arrêt maladie.
Contraintes ou opportunités ?
Certaines entreprises offrent déjà un régime d’acquisition de congés plus favorable. Elles pourraient toutefois revoir leurs pratiques en appliquant une acquisition moindre (2 jours par mois au lieu de 2,5) en cas d’arrêt maladie.
Pour cela, elles devront respecter les règles relatives à la dénonciation d’un usage favorable, notamment l’information et la consultation du CSE, ainsi qu’un préavis avant la modification des règles.